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Dans la partie 1 de cette série (Testez vos biais!), nous avons vu que la vision de l’esprit critique qui consiste à se focaliser sur la recherche d’erreurs, entre autres en identifiant les biais et les paralogismes dans les discours, est source de biais de confirmation et entretien les biais idéologiques.
Nous allons vous présenter ici d’autres outils, mais des outils méthodologiques et techniques qui permettent d’éviter les biais par des précautions extérieures au cerveau (l’équivalent des meubles molletonnés, pour reprendre la comparaison avec la dyspraxie). Il y a parmi ces outils des outils que nous qualifierons d’outils d’anticipation, car ils doivent être implémentés en-dehors de la situation où il est nécessaire de « faire attention ». Ils doivent être mis en place pour assurer une sécurité « de fond ». Nous compléterons par des outils d’approche, qui doivent être implémentés lorsque l’on est exposé à un discours, et notamment nous exposerons une méthode de lecture critique qui ne se focalise pas uniquement sur les erreurs.
A – Outils d’anticipation
Un premier outil, ça va être de se construire une culture générale. Comme on l’a dit, on repère mieux les erreurs lorsque l’on a une bonne connaissance d’un sujet, indépendamment des motivations qu’on a à le faire. Alors, oui, cela peut sembler élitiste, car ça prend du temps. Notez que l’autrice qui écrit la présente ligne n’avait aucune idée de ce qui était censé distinguer les courants politiques étiquetés gauche et droite à 20 ans, et a toujours une culture générale très hétérogène (ça ne se voit pas trop, mais c’est surtout parce que je tâche de me taire sur ce que j’ignore). C’est un travail qui se fait dans la durée, mais qui n’est pas inaccessible si on s’y met petit à petit. Et oui, c’est pénible, car ce travail donne un énorme sentiment d’insuffisance intellectuelle qui génère des complexes, mais dépassez cette pénibilité, et c’est quand même un énorme gain d’autonomie intellectuelle qui vous attend au fur et à mesure du chemin.
Par ailleurs, pour éviter les biais idéologiques (si on les définit comme le fait d’avoir une analyse rendue partiale par une prise en compte partielle des enjeux), il va falloir combler les angles morts des discours qu’on lit. Rappelez vous de ce qu’on a dit en première partie : les discours vont contenir des erreurs qui sont liées à la fois à un problème d’angle mort et à un manque de motivation de la part des personnes qui défendent ces idéologies à les repérer, parce que cela ne correspond pas à des enjeux dans la perception du monde de ces personnes. Typiquement, pour rendre ça un peu plus concret : une personne pourra avoir fait une mapmonde pour un objectif précis, et cette mapmonde sera utilisée pour un autre objectif (par exemple faire des essais nucléaires) sans penser à vérifier que la carte utilisée ne zappe pas des enjeux essentiel dans ce contexte là (angle mort : quand on n’est pas insulaire on n’a pas l’habitude d’être invisibilisé sur les cartes, motivation : quand on à l’habitude d’être invisibilisé on vérifiera plus souvent qu’on ne l’est pas – voir que d’autres ne le sont pas – pas car on sait les conséquences que ça peut avoir en terme de négligence d’enjeux). Bon les essais nucléaires c’est théorique hein, on espère quand même que ceux qui les font pensent à vérifier tout ça, mais tâchez juste de saisir l’idée, qui a une portée beaucoup plus générale (en particulier en lien avec ce qu’on appelle « les minorités », qui sont entre autre caractérisées par cette invisibilisation récurrente).
Donc pour contrer ces angles morts, ce qui va être nécessaire, en particulier, c’est de se construire une culture politique, c’est à dire une culture des courants d’idées qui peuvent exister; et s’il y a des courants d’idées différents qui existent, c’est pour des raisons matérielles bien concrètes : tout le monde ne se focalise pas sur les mêmes enjeux1. Explorer les courants d’idées, c’est donc se familiariser avec la diversité des enjeux existants2.
Donc, maintenant, comment vraiment diversifier ses sources et son exposition aux idées? Déjà, il ne faut pas avoir une démarche qui se limite à la confrontation aléatoire de sources. Il va falloir se construire une culture politique qui permette de repérer à quel endroit du spectre politique se positionnent les médias et idées qu’on lit. Et les prémisses et théories sous-jacentes aux analyses de ces médias. Cela, on ne l’apprend pas juste par la lecture des actualités, il faut lire (au moins) des articles de vulgarisation des théories politiques (idéalement, écrits par des gens des courants qui les défendent). Sur cette base, on ne va pas juste confronter ‘deux camps, droite et gauche’ mais on va échantillonner ses lectures en ciblant les sources de manière à combler ses lacunes d’exposition spécifiques, et de manière à comprendre les idées des courants politiques auxquels on n’est pas spontanément exposé.
Typiquement, là, comme on l’a dit, les deux journaux qu’on a cités dans l’article précédent (Libération et Le Figaro) sont des journaux libéraux, même si l’un est plus à droite et l’autre plus à gauche. Même l’Huma, le journal de diffusion nationale le plus à gauche, reprend dans une large mesure des prémisses libérales. S’y limiter va conduire au mieux à décaler son regard vers une version plus ou moins tolérante aux minorités du libéralisme, mais les fondements théoriques seront les mêmes. On aura une illusion d’accès à une diversité d’idées plutôt qu’un véritable accès à un panel représentatif de la diversité existante. Au final, vous n’allez que renforcer votre impression de vous être confronté à autre chose, et renforcer votre crédence dans des idées qui ne rencontrent jamais de contradiction dans ces sources qui valident la représentation hégémonique du monde.
Les idées de droite, et les idées à la droite de la droite ne sont pas difficiles à trouver. L’extrême-droite a largement son étal sur le soi-disant « libre marché des idées » entre autre parce que ça fait de l’audience, au prétexte qu’il faut que même le pire puisse être exprimé. A gauche par contre, on va avoir un problème. Si on prend au sérieux l’idée que « la gauche » est un camp (et c’est globalement le cas dans les médias de grande diffusion), alors ce camp, on va l’inventer sur la base du plus petit dénominateur commun. Et ce serait quoi, ce PPDC? Des déclarations morales consensuelles, au point de même pouvoir emporter, sur le principe, l’adhésion à droite (mais en principe seulement, à droite on s’est jamais trop foulé pour envisager des moyens à mettre en place pour y parvenir): quelque chose comme « tout le monde doit avoir de quoi manger, se loger, se soigner, personne ne doit être persécuté, etc. » En fait, comme ces grandes idées générales sont déjà défendues (en théorie) par à peu près tout le monde, elles n’ont même pas besoin d’étal spécifique – on n’a qu’à donner l’étal de « la gauche » à la gauche libérale, elle fera très bien ce taf.
A gauche donc, il est pratiquement impossible d’accéder à la diversité des idées existantes sans connaître préalablement quelque chose qui s’écarte du modèle libéral, ou dans le meilleur des cas, du modèle léniniste; et même accéder au modèle léniniste, c’est très compliqué (une fois de plus ce n’est largement plus le cas de l’Humanité). Bien sûr, dans ce processus de diversification, on n’a pas le temps pour tout, et comme il y a des courants et des sous-courants, parfois on n’ira pas loin dans le détail. On n’a pas besoin d’aller très loin dans le détail des courants d’extrême-droite dont de base on sait qu’on n’adhère pas à leurs prémisses (ex : si vous débutez, vous n’avez pas totalement besoin de pouvoir distinguer solidarisme et monarchisme). Mais il sera essentiel d’avoir une idée au moins vague du courant idéologique auquel le discours se rattache… pour savoir ce qui est important aux yeux de ceux qui le portent, ce discours.
Une méthodologie pour positionner les idées, discours, et personnes sur le spectre politique
Comment savoir si on a bien construit sa culture politique? Normalement, elle commence à être acquise quand lorsqu’on lit un texte, on est capable d’identifier par quel courant(s) politique(s) il a des chances d’avoir été émis (nope, y a pas de texte neutre, on vous dit). Attention (la pédagogie c’est la répétition, alors insistons) : placer sur le spectre politique, ça ne veut pas dire mettre tout ce qui est a SA droite comme étant de droite et tout ce qui est SA gauche comme étant de gauche. Ça ne veut pas non plus dire réduire à une étiquette. On a parlé de placer un discours, mais pour le faire, il faut placer les idées dudit discours, et/ou les personnes ou médias l’ayant rédigé ou diffusé. Et pour le faire, là aussi il faut une méthode.
Commençons par la question de comment placer des idées. C’est quoi une idée ? Il y a des faits (constat matériel consensuel), des arguments, des thèses, des théories, des concepts, la manière d’utiliser les concepts, des interprétations. Tout ne se classe pas sur un spectre politique. Par exemple, « une fraise est rouge » est un fait, il est consensuel, et il n’a pas de « charge politique ». Le fait que des faits n’ont pas de charge politique ça n’implique pas que aucun fait n’a de charge politique. « Les noirs subissent le racisme » est un fait ayant une charge politique. Et si je dis cette phrase dans un contexte où on voit que je l’affirme, ça peut aider autrui à me positionner politiquement3. Au moins par exclusion : « ah, ma crédence dans le fait que cette personne est nazie est faible ».
Les idées ont une charge politique qui dépend du contexte dans lequel elles sont évoquées. Par exemple, si j’évoque la théorie du ruissellement pour dire que la qualité de vie des pauvres augmenterait si seulement on enlevait des barrières à l’enrichissement des riches, ça situe le discours au sein de la droite libérale. Si je l’évoque pour dire que cette théorie est réfutée par les données, ça situe le discours comme étant plus à gauche (que la droite libérale).
Un argument n’existe pas seul, il n’est argument que parce qu’il argumente pour quelque chose – et la première question à se poser quand on veut l’évaluer, c’est « c’est quoi, ce quelque chose? » La valeur argumentative des arguments dépend toujours de la thèse défendue, et ils ne peuvent pas être interprétés sans avoir identifié la thèse. Par exemple, dire que X « sert à la soupe à l’extrême-droite », ça peut être un argument pour défendre 1- que X n’a pas conscience de l’impact de ses actions quand il invite des personnes d’extrême-droite dans son émission, ou 2- que X promeut l’extrême-droite. Mais il faut regarder le reste du discours pour le savoir. On attribue souvent une charge politique à des arguments en fonction d’une heuristique qui consiste a pré-supposer la thèse4. A tort, donc. Souvent la thèse est explicite, il suffit de lire tout l’argumentaire pour la trouver.
Petit point utile : les confusionnistes fascistes sont très adeptes du fait de ne pas expliciter leur thèse, et de donner seulement les arguments en sachant que tout le monde va faire la même heuristique pour identifier la thèse. Ça leur permet, lorsqu’on leur reproche, de dire « mais montrez où je défends explicitement cela! ». On ne peut pas. C’est une technique classique du confusionnisme (Définition wiktionary : fait d’entretenir la confusion dans les esprits et d’empêcher l’analyse objective des faits). Notez qu’on utilise souvent l’étiquette « confusionnisme » tout court pour qualifier le fascisme confusionniste, bien que cette stratégie rhétorique puisse être utilisée par d’autres courants politiques, car ils en sont les plus friands.
Bon. Par contre, attention. Revenons sur le spectre politique. Nous n’avons pas dit axe. Même si l’axe gauche droite est UN des repères du référentiel. Les idées seront plus positionnées en fonction des courants : anarchisme, gauche communiste, léninisme, social-démocratie, droite libérale, droite conservatrice, extrême droite sont des exemples de catégorisation. Mais on peut affiner à l’intérieur, et la liste n’est pas exhaustive. Il y a une part de subjectivité quand on délimite ces catégories, et qu’on leur attribue des idées – mais subjectif ne veut pas dire arbitraire; et cette part de subjectivité peut être objectivée, et permettre de dégager un consensus – surtout si on effectue le positionnement par un intervalle, plutôt que par un point fixe. Une même idée ou caractéristique peut être partagée par plusieurs courants (et même, quoique rarement, par des courants opposés)5. Une même idée peut ne pas être partagée par tout le monde dans un même courant.
Continuons avec la question de placer les personnes, ou les médias, qui diffusent les discours. Devoir positionner les personnes et les médias politiquement, c’est comme devoir qualifier un menteur (il y a une différence entre FAIRE et ÊTRE). On ne peut pas dire d’une personne qui n’a menti qu’une fois qu’elle est une menteuse. De même, ce n’est pas parce qu’on a véhiculé une fois une idée qui a une charge politique très située (très située ça veut dire que l’intervalle du positionnement est réduit) qu’on appartient au courant qui bénéficie directement de la diffusion de cette idée. En revanche, de la même manière qu’on devient menteur si on ment beaucoup, on devient du bord x si on véhicule principalement les idées dont la charge politique les rattache au bord x. Et ce, indépendamment de ce qu’on pense de soi. En particulier si on se pense apolitique6: en pratique cela fait souvent de soi un véhicule de tout ce qui passe. Et comme on est dans un monde capitaliste, et que toutes les idées n’ont pas la même tribune dans ce monde, ce qui passe, ce sont beaucoup plus les idées de droite libérale (vous avez déjà entendu parler de la théorie libérale du ruissellement, c’est autrement moins probable que ce soit le cas de la théorie marxiste de la valeur, bis repetita). Véhiculer les idées qui passent sans tri actif et sans la démarche explicitée dans le présent billet vous positionne (votre discours)7 la plupart du temps à droite. Après c’est large, la droite. Le positionnement exact va dépendre de votre entourage immédiat, et de vos conditions sociales (car en réalité, y a des idées que vous serez réticents à diffuser, selon la manière dont elles vous impactent…).
Bref. Pas besoin de lire dans les pensées pour situer les personnes (via leurs discours, voir note 7) politiquement. Répétons-le, on ne parle pas de dire « untel est trotskyste » a partir d’une phrase prise au hasard. Il s’agit d’affiner l’intervalle du positionnement au fur et à mesure qu’on *accumule les données*. On peut d’ailleurs affiner le positionnement en vérifiant qui a écrit et ce que cette personne écrit d’autre, ou en regardant ce que dit une recherche internet sur le courant idéologique auquel le média et la personne qui portent le discours se rattachent.
Nous n’aimons pas plus que vous les étiquetages précipités qui servent à rejeter un discours avant de l’avoir compris (d’autant moins qu’on en est régulièrement victimes, comme on l’a précisé en introduction). Par contre, les étiquetages étayés sont indispensables à l’esprit critique. A la fois pour aider à identifier les thèses quand elles ne sont pas très explicites et pour avoir conscience des probables manquements du discours (les choses qui « manquent », comme les îles, parce que la personne qui porte ce discours ne les considère pas comme importantes).
B – Outils d’approche
Mais cela ne suffit toujours pas (!). Quand vous allez élargir votre panel de lecture, vous devrez avoir une lecture qui ne consiste pas à seulement « débusquer les erreurs », et à rejeter le discours si vous en trouvez. Vous devrez avoir une lecture méthodique. La première étape d’une telle lecture est d’identifier les éléments constitutifs du contenu que sont 1-la thèse, 2-l’argumentaire, et 3-les arguments8. De la même manière qu’une théorie n’est pas réfutée juste parce qu’une prédiction n’a pas été vérifiée, une thèse n’est pas réfutée juste parce qu’un argument est invalide ! Il faut apprendre à lire en cherchant à comprendre l’argumentaire et comment il défend la thèse, avant de commencer à chercher les erreurs. Car sinon, comme on repère plus facilement les erreurs « des autres », répétons-le encore : on rejettera la thèse parce qu’il y a des erreurs (alors qu’il y en a presque toujours), même si ces erreurs ne lui sont pas fatales, et on nourrit son biais de confirmation (prends ça Popper). Les erreurs ne sont en fait fatales que si elles sont une vraie faille dans la défense de la thèse9 (on peut voir les arguments comme des piliers d’un argumentaire, et il ne suffit pas qu’un pilier tombe pour que l’argumentaire tombe). C’est un peu une défense de la nécessité de s’attaquer aux hommes de fer plutôt qu’aux hommes de paille, que nous faisons ici, mais en généralisant pour dire qu’au delà des hommes de paille, il ne faut pas se limiter à l’attaque des arguments les plus faibles. Notez que la méthodologie que nous présentons ici n’est pas très différente dans ses principes (identifier la thèse en premier lieu, puis regarder quelles sont les limites de l’argumentaire dans la défense de cette thèse) de celle que nous avons développée dans Lecture critique d’un article scientifique, même si la manière dont la méthodologie est développée dans ce dernier est nécessairement plus technique.
Il ne s’agit donc pas seulement de chercher à identifier les possibles angles morts sur les erreurs que les discours commettent ou non, mais il faut aussi et surtout éviter de prendre pour des « erreurs » des idées avec lesquelles vous n’êtes tout simplement pas familier – ou encore éviter de rejeter une thèse parce qu’un argument est mauvais alors que vous n’êtes pas encore assez familiarisé avec la thèse pour savoir si cet argument est nécessaire à l’argumentaire qui la défend. Sur ce second point, la prudence devrait conduire, en première lecture, à ne pas s’arrêter du tout aux arguments pris isolément la première fois qu’on est confronté à une position qu’on ne connaissait pas. Commencez d’abord par ne vous intéresser qu’à la thèse et à la structure générale de l’argumentaire. Quand vous serez assez à l’aise avec la thèse pour l’énoncer vous-même, et seulement à ce moment-là, vous serez prêt à vous intéresser aux arguments qui la soutiennent.
Maintenant, une fois qu’on en est arrivé à être assez familiarisé avec un type de thèse pour ne pas voir des erreurs à chaque bout de phrase, les choses deviennent un peu plus facile, vous allez voir (oui, on en chie beaucoup au début, mais plus le temps passe et plus ça s’améliore, c’est ça qui est bien 😉 ). Exemple pratique. Quelle est la thèse de cette image?
La thèse de cette image est qu’il faut porter le masque (c’est écrit en bas). L’argumentaire, c’est que si la personne qui est contagieuse ne porte pas de masque, le risque de contagion est le plus élevé, si la personne qui est contagieuse porte un masque, il est moins grand, et si tout le monde porte des masques, contagieux ou non, le risque de contagion est le plus faible. Les arguments, ce sont les comparaisons qu’on peut faire deux à deux entre les trois chiffres qui sont donnés. Or, les chiffres sont tous sortis du chapeau (comme l’indique ce débunkage par Libération : l’image est fausse). Tous les arguments tombent à l’eau. Est-ce que pour autant l’argumentaire est mauvais ? Non ! Est-ce que pour autant la thèse est fausse ? Non ! Au final, si on a cette démarche de bien identifier la thèse et l’argumentaire en premier lieu, devant les arguments on pourra plus facilement se dire « eh, mais je suis d’accord en fait… juste, l’image est mal formulée »10. On peut avoir raison pour de mauvaises raisons, et être capable de le voir, c’est faire preuve d’une charité épistémique à bon escient. Idéalement, si on partage la même thèse, on peut même être sympa et refaire l’image de la manière suivante :
Ça, retenez le pour votre esprit critique : celui qui est dans votre camp (ici, au sens « celui qui a la même position que vous, celui qui défend la même thèse ») ne vous « debunke » pas, il améliore l’argumentaire.
On notera que l’amélioration de l’information, ici, a consisté à remplacer des chiffres, qui « font plus scientifiques », par des appréciations… plus approximatives et plus subjectives! Et au final, les appréciations plus approximatives sont ici moins fausses ( !) car elles n’ont pas prétention à une précision qu’elles n’ont pas. Pour votre esprit critique, retenez ça aussi : c’est une bonne illustration du fait que le qualitatif est parfois plus valable que le quantitatif11 (Pour aller plus loin à ce sujet, vous pouvez regarder cette vidéo de Patchwork qui porte sur la nature construite des statistiques).
La rhétorique du mais
Pour insister un peu sur cette idée de « améliorer l’argumentaire » : il y a plein de gens qui prennent des précautions oratoires du genre « je suis féministe, mais… le pay gap est un mythe » et qui ne font que du débunkage, sans contribuer à l’amélioration de l’information alors que c’est ce qui est vraiment nécessaire, en fait, si on partage la même thèse. Imaginez quelqu’un qui dit « Je ne suis pas anti-masque, mais les chiffres sont tous faux, on nous ment ! » La précaution oratoire apparait pour ce qu’elle est, lorsqu’on a en tête le fait qu’il est possible d’améliorer l’argumentaire de son camp idéologique plutôt que de le « debunker » : cette précaution oratoire est une manipulation, qui vise à abaisser la vigilance en brouillant les étiquettes, en masquant à quel « camp » se rattache l’auteur du débunkage, ce qui ne permet pas d’identifier quels sont.. ses vrais enjeux, et ses probables angles morts.
Pour revenir rapidement au pay gap, le mythe n’est pas celui qu’on croit : le concept de pay gap est l’écart de revenu moyen entre hommes et femmes qui travaillent, et non l’écart de revenu à temps égal et à travail égal. Il a un intérêt en soi à cause de la différence d’autonomie financière qui en découle (voir pay gap sur Wikipédia). On notera que l’argumentaire des détracteurs du pay gap peut se résumer à « si on enlève l’effet de toutes les variables explicatives12, il ne reste aucun effet ». Merci Sherlock. Soyons clairs: en réalité, « je suis féministe, mais… le pay gap est un mythe », n’a jamais été prononcé que par des anti-féministes : leur véritable enjeu, c’est bien d’attaquer le féminisme13.
Pour une analyse détaillée de cette rhétorique du mais lorsqu’elle est utilisée par les TERF, nous conseillons vivement la vidéo J.K. Rowling par Contrapoints.
Pour résumer, il faut échantillonner ses lectures en ciblant plutôt ses lacunes, lire en cherchant à comprendre la thèse et la manière dont elle est soutenue par l’argumentaire plutôt qu’en se focalisant sur les erreurs. Il faut évaluer la thèse en ne se limitant pas à un seul discours, mais en diversifiant ses sources pour avoir accès à la diversité des perspectives existantes. La thèse ne tombe que si aucun des argumentaires développés pour la soutenir ne tient la route14, c’est-à-dire que pour chacun des argumentaires spécifiques, on trouve des arguments nécessaires à cet argumentaire qui sont mauvais, ou s’il y a des problèmes importants dans les prémisses (inclues évidemment les prémisses cachées)15.
Dans la Partie 3 – Tous les modèles sont faux, mais certains sont utiles, nous nous demanderons s’il est possible d’obtenir une représentation du monde (comme une mappemonde) qui intègre toutes les données disponibles et ferait la synthèse de tout ce qui est essentiel pour parer à tous les enjeux, au moins ceux qu’on a déjà identifiés. Ou, dit autrement : S’il est possible d’avoir une synthèse qui serait «objectivement la plus objective» ou, dans la perception de certains, qui serait « neutre ». S’il est possible d’obtenir, en adoptant vraiment très rigoureusement la méthodologie décrite plus haut une description du monde exempte d’erreurs, et qui permette de ne louper aucun enjeu essentiel, qui prenne en compte tous les enjeux identifiés collectivement.
Merci à Germain, Patient Zéro, Tankietfield, annoyinganoia, Lucie Tréto, Émeric, Kum0kun, Vin Teuil, Nonoche, Dr Baratin, Goto Van Kern, Rym, Patchwork, et Jay Setra pour leurs relectures et retours sur la série !
Notes :
- Pour les anglophones, le youtubeur Alim Alrah a réalisé une excellente vidéo qui, à partir d’une critique du (déplorable) « political compass », analyse dans une perspective marxiste les motivations derrière différentes approches politiques. Toujours à propos du « political compass », et en français cette fois, le Panda Roux le plus connu de twitter, Pandov Strochnis, a écrit un article très intéressant pour montrer ses limites, dans une perspective proche de ce que nous disons sur la question des motivations.
- Notez qu’il y a un lien causal entre le fait que les idées et courants d’idées soient un produit des conditions matérielles d’existence et le fait que se construire une culture politique solide soit une nécessité pour contrer ses angles morts. Parce que les courants d’idées sont des produits des conditions matérielles d’existence, elle portent (et formalisent) des enjeux liées à ces conditions matérielles. Pour comprendre lesdits enjeux, l’heuristique la plus sûre en théorie serait du coup de changer ses propres conditions matérielles d’existence, mais bon, nous ne pensons pas qu’il soit nécessaire de nous étendre sur le fait que ce ne serait pas une méthode très pratique. En pratique donc, tout ce qui reste, c’est chercher à compenser par un apprentissage d’autant plus compliqué qu’il se fait contre des angles morts directement produits par notre propre vie, et donc dans lequel nos intuitions et réflexes de pensée vont toujours jouer contre nous. Bref, la méthode la plus sûre qui reste, c’est d’en passer par un apprentissage théorique méthodique. Si on en reste à la seule force de son cerveau, on est à peu près sûr de passer totalement à côté de la logique générale de la théorie.
- Pause. Ceux qui aiment répéter « je ne fais qu’affirmer des faits » ou « il faut séparer le descriptif du prescriptif », relisez ce passage. On reviendra un peu dans le prochain article sur la notion de « neutralité axiologique », on n’a pas fini de vous embêter avec ça.
- Attention, on dit bien « pré-supposer ». Il est aussi très, courant à l’inverse, face à la critique d’un discours fascisant, que des turbocerveaux rationnels-centristes présupposent que l’on présuppose que ce discours est fascisant, quand bien même le discours est correctement identifié comme étant fascisant. Gaffe à ça, aussi: si quelqu’un critique un discours sur la base de l’idée que ce discours est fascisant, ça ne veut pas dire qu’il le fait à partir d’un présupposé; intéressez-vous un peu à ses justifications pour fonder cette base plutôt que de crier au gauchiste-qui-voit-des-fascistes-partout.
- C’est une des ornières dans lesquelles le campisme se vautre systématiquement : à partir du moment où on accepte de prendre parti, totalement et sans nuances, pour un camp impérialiste contre un autre camp impérialiste, tout ce qui est contre le camp adverse et pour « notre » camp devient de « notre » camp.
A ce sujet, la notion de « campisme » est souvent mal comprise – et souvent traitée comme étant synonyme d’attachement à son idéologie politique. Déjà, être attaché à son idéologie politique n’est absolument pas un problème en soi, pas plus que de considérer des idéologies comme adverses. Ensuite, certes, ledit attachement peut effectivement poser des problèmes, parfois graves, mais les versions problématiques de cet attachement sont bien mieux désignées par la notion de biais pro-endogroupe.
Le campisme est quelque chose d’assez différent: ce n’est pas simplement avoir une idéologie politique et considérer d’autres idéologies comme adverses (sans quoi, en vrai, à peu près tout le monde serait campiste). Le campisme est un état d’esprit qui divise le monde en fonction d’une séparation entre deux camps impérialistes, choisit un de ces camps comme « son » camp et l’autre comme camp ennemi, et en vient à une défense systématique de « son » camp et une attaque systématique du camp « ennemi ». C’est cette binarité et cet absolutisme qui font le campiste. Le fait de dire qu’on n’aime pas le Figaro parce que c’est un journal de droite n’est pas du campisme (c’est surtout un raccourci, mais on va pas revenir à chaque phrase sur les raisons qui font qu’on n’aime pas la droite). Dire que le Figaro est un journal de droite et que par conséquent tout ce qu’il y a dedans est faux, ça, oui, c’est du campisme.
C’est un terme qui a vraiment pris son essor dans le contexte de la Guerre Froide, et qui désigne une attitude spécifique de réduction d’une problématique politique à deux camps opposés; dans le contexte de la guerre froide, il désignait les communistes (particulièrement staliniens) qui étaient dans une position d’opposition systématique aux USA et de soutien systématique à l’URSS (le terme est spécifique en général aux idéologies politiques, et est très souvent encore plus spécifiquement spécifique de nos jours aux nostalgiques a-critiques de l’URSS et aux postures pro-russes/anti-américaines, même si on pourrait parler par extension de sens de « campisme » dans tout ce qui procède de la justification d’un camp par l’existence d’un autre camp adverse, pensez Foucart vs. l’Afis…). Vous trouverez quelques informations quant au campisme sur le Wikirouge. - Strictement. Beaucoup de gens se disent « apolitiques » parce qu’ils sont a-partisans, et ce n’est pas la même idée, même si on peut tout-à-fait être a-partisan et se penser vraiment comme a-politique, c’est-à-dire comme au-dessus des préoccupations politiques.
- Insistons sur l’importance de cette parenthèse. Ce qui nous qualifie politiquement n’est pas un set de caractéristiques essentielles, mais des caractéristiques qui nous sont contingentes. On change d’idéologie politique, au cours du temps. Plus précisément encore, ce changement est déterminé par les changements dans la place qu’on occupe dans les structures sociales. Quiconque a déjà vu son vieux pote communiste devenir libéral après avoir ouvert sa petite entreprise de matériel sportif pour curling sur gazon devrait voir de quoi on parle.
- Certains arguent régulièrement que leur discours ne vise pas à convaincre d’un thèse, ou qu’ils ne cherchent « qu’à exposer les faits ». Attention, l’esprit critique ne peut s’arrêter aux intentions. A ce propos, lire par exemple cet article.
- Et à cet égard, pour toutes ses vertus, même la logique ne suffit pas à prouver une « vraie faille ».
C’est un des problèmes qui sont passés au couperet des pressions pour faire plus court dans « Fauxphismes : une introduction« , mais c’est une chose importante, sur laquelle on comptait bien revenir: un paralogisme peut être, et est, très souvent, un bon argument mal formulé – et on va revenir là-dessus, avec un exemple concret, juste en-dessous dans cet article.
Quoiqu’il en soit, si il vous en manquait encore, voilà une raison supplémentaire de vous refuser au petit jeu triste de la chasse au « sophisme ». - Répétons-le: il n’est pas rare qu’un argument bancal, voire un paralogisme, soit juste un bon argument mal formulé.
- On peut ajouter que le qualitatif ne délivre pas nécessairement une information de la même nature : il n’est pas équivalent de dire « il fait 12°C », et « il fait froid » : la seconde information vise à communiquer une information supplémentaire, qui est la conséquence de la température en termes de ressenti.
- Comme le fait que les femmes passent plus souvent à temps partiel pour s’occuper des enfants, entre autres nombreuses variables explicatives…
- C’est là une très belle illustration de l’adage selon lequel dans les phrases de type « je suis X/je ne suis pas Y mais« , on comprend mieux le sens quand on a compris que strictement tout ce qui est prononcé avant le « mais » n’a aucune valeur.
- Alors oui, on a bien conscience que les discours conspirationnistes instrumentalisent cette nécessité à leur profit, en construisant et reconstruisant leurs arguments et argumentaires à la volée. On n’est pas en train de vous dire de vous épuiser à vous confronter à la liste infinie des argumentaires qu’ils vont vous présenter au fur et à mesure que vous décrypterez le précédent; par contre, ce qui est vrai dans les discussions avec des conspirationnistes ne l’est pas forcément dans les discussions en général, et là, clairement, si vous traitez toute nouvelle idée en fonction de ce qui est le plus efficace pour les discours conspis, vous ne risquez pas de comprendre quoique ce soit à une idée nouvelle pour vous.
Pour ce qui est des théories politiques, c’est quand même nécessaire de fouiller plus loin qu’un seul discours, ne serait-ce que parce que vous avez une probabilité très loin d’être nulle de croiser la route de militants qui ne sont pas encore bien familiarisés avec la théorie dont ils se réclament. Quand l’un des rédacteurs du présent article, et auteur de cette note (Gaël Violet) avait 21 ans, il a découvert les situationnistes; il y avait plein de trucs qui lui semblaient cool dans leurs théories, et il n’arrêtait pas d’en parler – mais pour être franc, en vrai, il en panait que dalle; quelqu’un qui aurait discuté avec lui, à cette époque, de ce qu’était la théorie situationniste aurait eu de très bonnes raisons de la rejeter comme semi-délirante. - Bon évidemment on décrit un cas idéal hein. Chacun est libre de l’énergie qu’il souhaite dépenser pour se faire une idée de la valeur d’une thèse, et on n’a matériellement pas le temps d’aller jusqu’au bout pour chaque thèse de chaque sujet (c’est virtuellement infini), si tant est du reste, que pour une thèse donnée, l’idée d’atteindre ce cas idéal soit possible (il y a déjà une barrière: les seuls arguments existants se résument aux arguments exprimés, et il n’y a aucune raison de supposer que les arguments exprimés recouvrent la totalité des arguments possibles. Quoiqu’il en soit, une démarche de compromis serait d’essayer de se faire l’idée la plus juste possible de la distance parcourue vers ce cas idéal depuis notre conception naïve préliminaire. Là encore, c’est impossible d’en avoir réellement une idée juste, mais l’impossibilité de la perfection n’est pas une excuse pour ne pas chercher à tendre vers celle-ci (encore une fois, dans la limite de vos forces, n’allez pas vous épuiser non plus si vous ne voulez pas). Notez par ailleurs que ce n’est pas par hasard qu’on a choisi la mesure du chemin depuis le point initial plutôt que le point à atteindre : vous ne pouvez pas savoir à quelle distance se trouve le point à atteindre.
Merci beaucoup pour cette suite (qui arrive si rapidement après la première partie) !
Je devrai sans doute encore la relire pour bien m’imprégner des idées exposées et des conseils.
Il y a toutefois déjà une question qui me vient à l’esprit.
Dans la partie A de cet article, afin de pouvoir mieux juger de manière critique et essayer d’éviter ses biais idéologiques, il est proposé de commencer par se construire une culture politique, et ce afin notamment d’être capable d’identifier les positionnements (implicites) de certains discours dans des courants idéologiques/politiques. Avec cet objectif en tête, je serais personnellement intéressé (mais peut-être que d’autres lecteurs le seraient également) par des conseils de lecture. En particulier, donc, de la vulgarisation des théories politiques. Par exemple, des références qui aborderaient la liste (non exhaustive) des courants que vous citez : anarchisme, gauche communiste, léninisme, social-démocratie, droite libérale, droite conservatrice, extrême droite. De toute façon, moi j’ai des lacunes en tout. Par exemple, j’avais déjà personnellement identifié la lecture potentielle suivante (sans savoir toutefois ce qu’elle vaut) :
Samuel Hayat, Julien Weisbein, *Introduction à la socio-histoire des idées politiques*, De Boeck Supérieur, Octobre 2020
Je ne sais pas si jamais vous auriez quelques conseils de lecture à partager sur les différents courants, en particulier pour le lecteur débutant (et, bien sûr, aussi le temps et/ou la motivation des les partager) ?
Je me permets de proposer de patienter un peu, j’aimerai étayer ma réponse d’éléments qui sont dans la 3e partie à venir.
Bonsoir.
Pour ma part je serais bien en peine de vous répondre, parce que ma méthode (ou mon absence de…) a surtout consisté à être un quarantenaire insomniaque: je me suis forgé une culture politique sur la (très longue) durée, sans en passer par des manuels de synthèse, et je me vois mal vous dire: « prenez 20 ans pour participer à des groupes politiques et lire de la théorie directement, voici une liste ». Ce serait assez peu constructif comme conseil – vraiment, compenser une absence de méthode par un apprentissage à la dure et sur une durée qui se compte en décennies, bon…
Je demanderai un peu autour de moi si des gens dans le collectif ont croisé de bons manuels introductifs – comme un certain nombre sont des universitaires, ils n’ont pas ma désorganisation d’autodidacte quand il s’agit d’acquérir des connaissances. Croisons les doigts 😉
Bonjour,
Je n’ai pas fini de lire l’article mais déjà je vous remercie pour votre site et l’investissement énorme que cela doit représenter… Je vous ait découvert très récemment grâce à Patchwork. Je ´rattrape ´ donc vos articles car je les trouve très intéressant à lire. Et je voulais répondre vis à vis de la note 2 et de manière générale sur comment ´mettre en perspective ‘ . Je me disais que certes on peut difficilement changer ses conditions matérielles de vécu mais une approche consistant à commencer à utiliser son empathie pour comprendre en profondeur et presque vivre dans sa chair les vécus d’autrui ( que ce soit par leur fréquentation active et la volonté de les comprendre et de se mettre à leur place, la lecture de témoignages / romans / autobiographies ). Il reste évidemment beaucoup d’angles morts dans cette approche qui peuvent être compléter par une connaissance théorique méthodique, mais je me disais juste que ceci est une autre approche qui pourrait fonctionner aussi .
Bonjour, et merci beaucoup de votre message!
L’empathie est un très bon outil pour saisir des perspectives différentes des siennes, mais il faut rester conscient des problèmes qu’elle induit, et notamment, un risque de sur-estimer sa compréhension et son sentiment de proximité.
Votre question, en fait, rejoint celle de « comment être un allié » pour des combats qui ne nous touchent pas directement. Il n’y a pas de solution parfaite à cette question (les solutions parfaites sont rares, en général 😉 ), mais on peut s’appuyer sur des ressources riches de toutes celles et tous ceux qui ont pensé cette question depuis des décennies.
Je vous laisse avec cette vidéo (en anglais) qui aborde la question d’une manière intelligente (par rapport à la question de la lutte politique des noirs américains, mais beaucoup de choses sont transposables aux autres luttes). Je pense qu’il est assez clair que le maître-mot devrait rester, même après une approche empathique appuyée par une connaissance théorique, la modestie: à la notable exception des mouvements de libération animale qui ne peuvent être que des luttes d’alliés, pour toutes les autres luttes, les groupes qui subissent une oppression sont toujours les mieux à même de les livrer, et apporter son soutien inclut toujours une grosse composante de mise en retrait (dans la vidéo, vous verrez les problèmes que F.D. Signifier associe à l’allié « homie », autrement dit « pote », qui pourtant partage une grande partie du vécu de ses potes noirs américains – mais sans en partager entièrement les conséquences, ce qui même à eux, leur fait un point aveugle non-négligeable).
A bientôt, et merci encore de votre lecture.